La police de Vichy

Un soldat SS avec un policier français. © Mémorial de la déportation

Bertolt Brecht : « Le ventre est encore fécond d’où a surgi la bête immonde. »             Un avertissement dont il faut hélas encore tenir compte…

La police de Vichy au service de l’ennemi.

De nombreuses victimes de notre secteur ont été arrêtées à cause de la véritable chasse aux patriotes menée par le commissaire Soutif et ses supplétifs.

Un rapport Soutif, en 1942

« Le chef de poste de douane allemand de Léchiagat a reçu d’un informateur une déclaration aux termes de laquelle il existerait à Léchiagat un « Centre de Résistance » composé d’individus ayant appartenu au parti communiste ou ayant des sympathies pour le communisme ou le gaullisme. Ces derniers auraient constitué un dépôt d’armes parmi lesquelles se trouveraient une mitrailleuse et des munitions. Des réunions auraient lieu, des tracts seraient confectionnés et distribués. Voici la liste des personnes soupçonnées d’appartenir à cette organisation: Larnicol Jean Désiré, ex-maire de Treffiagat, Hénot (sans désignation de prénom) maçon, Le Coz Jean, menuisier, Quiniou Louis (?) marin-pêcheur, Bolloré, Larnicol Pierre Jean, tailleur, le Goff, instituteur.

Les réunions auraient lieu chez le Coz, Larnicol, les soeurs Charlot (café de la Pointe) ou chez une veuve Cossec , tenancière d’un maga­sin de chaussures. Parmi ces personnes, trois (les deux Larnicol et Le Coz) sont connues comme ayant appartenu au parti communiste.

Il a été convenu entre le chef de service alle­mand et moi-même que je procéderai à une enquê­te préliminaire et qu’ensuite, des perquisitions seraient faites à Léchiagat par les polices alleman­de et française travaillant conjointement. Le concours de la gendarmerie devra être sollicité… « .

Une autre lettre de la même date signée du chef de l’aussenKommando Hoth fait état de deux correspondants, dont le garde-champêtre, et signale un plan sur lequel sont repérées les habitations des personnes soupçonnées.

Ce document authentique révèle entre autres– si ce n’était déjà prouvé – la collaboration de l’État français avec les Allemands par l’utilisation de sa police dans la répression contre la Résistance, et dans la surveillance particulièrement minutieuse des habitants de Léchiagat.


Un écrit manuscrit d’Alain Signor intitulé « La police de Vichy au service de l’ennemi »


LE COMMISSAIRE SOUTIF

( note de JK : Tous ces documents figurent dans « Les Clandestins de l’Iroise » ( tome 2 -1942-1943) ( pages 475 à 517) de René PICHAVANT  )

Voici, sans commentaire , le rôle tenu par le commissaire Soutif, selon lui-même et quelques-uns de ses proches…

« Soutif Henri, Jean, Prudent. Né le 27 mars 1913, Français, commissaire de police, marié, 3 enfants. Dernier domicile légal, 8 avenue de la gare, Quimper. Dernière adresse de fait: 5, rue Pipien à Longjumeau. Père: Soutif Henri, 56 ans, ingénieur de la S.N.C.F. Etudes: Bachelier B. Philosophie, académie de Besançon. Licencié en droit, Faculté de droit de Paris. Titulaire de la partie commune aux licences de lettres, Académie de Paris (mention Anglais). Stage d’une année scolaire en qualité de lecteur au Liverpool Institute, établissement d’enseignement dépendant de l’université de Liverpool. Connaissances linguistiques: anglais-allemand.

Fonctions ou emplois: Reçu avec numéro 1 au concours du Commissariat de la Police Nationale en décembre 1936. Nommé le 16 avril 1937 commissaire de police à Héricourt (Haute-Saône). Nommé en 1938 à la Brigade Régionale de Police mobile à Rennes. Mobilisé en 1939. Réintégré dans la police en 1940 au même poste. Nommé le 1er juillet 1942 commissaire, Chef du service des Renseignements généraux à Quimper. Révoqué par arrêté de l’Oberstumfürher Joseph Darnand le 6 juillet 1944.

Aucune condamnation.

*****************************************************************************************************************

LQ SECRET

QUIMPER LE 14 AOUT 1942

Commissariat aux Renseignements GÉNÉRAUX- QUIMPER Objet: Anciens Communistes à Lechiagat

Référence: Entretien verbal avec le commissaire SOUTIF . Pièces jointes: 4.

Des renseignements parvenus de source digne de foi, nous informe qu’il y a à LECHIAGAT des individus ex-communistes qui tiennent cachés une mitrailleuse, des fusils et des munitions qui font de la propagande en faveur de l’Angleterre, qu’ils confectionnent et distribuent des tracts dirigés contre l’occupation allemande et qui organisent des réunions.

D’après .les renseignements reçus il s’agirait des personnes figurant sur la liste ci-jointe, leurs habitations sont repérées sur le plan annexé.Indépendamment des indications ci-dessus, il nous a été remis par un soldat un billet joint au dossier et sur lequel figurent les mêmes communistes et gaullistes.Les investigations ont permis d’établir que ce billet a été remis au soldat par l’intermédiaire du garde champêtre BOURLIGUEUX originaire de TREFFIAGAT et demeurant au Guilvinec. Il est remarquable que l’homme de confiance, ainsi que l’auteur du billet indépendant l’un de l’autre, aient tous deux désignés les mêmes personnes, comme étant communistes ou gaullistes et rédacteurs de tracts.

Je vous demande de vérifier les indications ci-dessus par une enquête discrète conformément à notre accord verbal du 12.08.42.

Signé: ROTH chef de l’Aussenkommando QUIMPER

***************************************************************************************************************
MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR DIRECTION GÉNÉRALE de la POLICE NATIONALE ETAT FRANÇAIS

Quimper, le 14 août 1942

SECRET

Le Commissaire aux Renseignements Généraux à Monsieur le Préfet du FINISTÈRE (Cabinet)

J’ai l’honneur de vous rendre compte de ce qui suit: J’ai été convoqué ce matin à 10 heures au Aussenkommando de la Sicharhoits Polizei où le Chef de ce service allemand m’a mis au courant des faits suivants :

Le Chef du Poste de Douane allemand de Léchiagat a reçu d’un informateur une déclaration aux termes de laquelle; il existerait à Léchiagat un « Centre de Résistance » composé d’individus ayant appartenu au parti communiste ou ayant des sympathies pour le communisme ou le gaullisme. Ces derniers auraient .constitué un .dépôt d’armes parmi lesquelles se trouverait une mitrailleuse et des munitions. Des réunions auraient lieu , des tracts seraient confectionnés et distribués. Voici la liste des personnes soupçonnées d’appartenir à cette organisation :

LARNICOL Jean Désiré, ex-maire de Tréffiagat – HÉNOT (sans désignation de prénom ) maçon à Tréffiagat

LE COZ Jean, menuisier à Treffiagat – QUINIOU Louis, marin-pêcheur à Tréffiagat – BOLLORÉ (sans désignation de prénom) à Treffiagat

LARNICOL Pierre Jean, tailleur à Tréffiagat – LE GOFF ( sans désignation de prénom) instituteur à Tréffiagat.

Les réunions auraient lieu chez LE COZ, LARNICOL, les soeurs CHARLOT (café de le Pointe) ou chez une veuve COSSEC tenancière d’un magasin de chaussures.Parmi ces personnes, trois (les deux LARNICOL et LE COZ) sont connues comme ayant appartenu au parti communiste.

Il a été convenu entre le Chef de Service allemand et moi-même que je procèderais à une enquête préliminaire et qu’ensuite, des perquisitions seraient faites à Léchiagat par les Polices allemandes et françaises travaillant conjointement. Le concours de la gendarmerie devra être sollicité, les perquisitions devant avoir lieu simultanément.

Je vous rendrai compte de la suite de cette affaire. Signé : Soutif

*********************************************************************************************************************

Le mercredi 19 août 1942 vers six heures du matin, le petit port de pêche de Léchiagat était en état de siège. Toutes les issues principales étaient gardées par des pelotons de soldats allemands armés jusqu’aux dents. Un déploiement de forces importantes et la présence d’une voiture cellulaire laissaient prévoir de nombreuses arrestations.

Des officiers et soldats allemands , des gendarmes de QUIMPER et des brigades environnantes , des policiers civils dont les inspecteurs de la sûreté SOUTIFet MARCHAND pendant plusieurs heures perquisitionnèrent aux domiciles des personnes ci-dessous :

Monsieur Laurent HENOT , maçon ;Monsieur Michel LE GOFF, instituteur ;Madame veuve: COSSEC, commerçante ; Monsieur Désiré LARNICOL, maire de la commune de Treffiagat ;Monsieur Joseph QUlNIOU, adjoint au maire ;Monsieur Amédée COURTES. patron-pêcheur ; Mesdemoiselles CHARLOT- commerçantes : Monsieur Pierre Jean LARNICOL. Tailleur ; Monsieur MENDELBOUM , sujet roumain, réfugié.

( Rapport de Michel Le Goff, instituteur, Mme Le Goff, institutrice, Guillaume Bodéré, Laurent Hénot, Mme Hénot, Mme Bodéré, Mme Bolloré, M.Larnicol Corentin , établi à Léchiagat le 7 décembre 1944).

********************************************************************************************************
MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR REPUBLIQUE FRANÇAISE

QUIMPER, le 29 Octobre 1942

Commissariat aux Renseignements généraux QUIMPER

Cher Monsieur MOREUX.

Ainsi que je vous l’avais promis, je vous adresse copie du rapport que j’ai fait tenir à M. le Préfet du Finistère dans une affaire de répression du terrorisme , du communisme et des menées anti-nationales.. J’ai, en outre, le plaisir de vous faire connaître que, depuis la rédaction de ce rapport, l’auteur de l’attentat dont vous avez, ainsi que votre famille, failli être victime, est actuellement sous les verrous. Croyez, cher Monsieur MOREUX. à mes sentiments les meilleurs.

M MOREUX était délégué départemental à la propagande…

*****************************************************************************************************************

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR – Direction Générale de la POLICE NATIONALE

Commissariat aux Le Commissaire de la Police Nationale, Renseignements Généraux Chef du Service des Renseignements

QUIMPER

No

OBJET: Répression des menées terroristes, communistes et anti-nationales

ETAT FRANÇAIS Quimper, le 24 octobre 1942

à Monsieur Le PREFET du FINISTÈRE

à QUIMPER

J’ai l’honneur de vous rendre compte de ce qui suit: J’ai procédé, depuis le 27 septembre dernier, dans le département du Finistère, à une enquête dans les milieux terroristes, communistes, gaullistes, qui a abouti à I’arrestation de cinquante individus et à la mise en liberté provisoire de deux autres. En outre, neuf individus contre lesquels des charges importantes ont été relevées, sont actuellement en fuite et activement recherchés.

Cet important résultat n’a pu être acquis que grâce à la parfaite collaboration entre les divers services de police et de gendarmerie dont le rôle sera mis en évidence au cours du présent rapport. Le concours de la Gendarmerie, sous les ordres du Chef d’Escadron POUGNANT, Commandant la Compagnie du Finistère et du Capitaine LE THOMAS, Commandant la Section de QUIMPER, a permis, chaque fois que cela était nécessaire, de procéder avec sécurité à de nombreuses arrestations simultanées. En outre, ce service a obtenu d’intéressants résultats aupoint de vue judiciaire. La section spéciale des affaires judiciaires à caractère politique de LORIENT, représentée par M. MITAINE, Commissaire de Police, a fourni à I’affaire ses premiers éléments utilisables.En outre , ce fonctionnaire, détaché à QUIMPER, a participé d’une manière active à la plupart des opérations diligentées dans le Finistère; enfin, la 13e Brigade de Police Judiciaire, représentée par M. MOREAU, Commissaire de Police Judiciaire à Rennes, a exploité les nombreux renseignements recueillis dès le début de I’enquête, tant dans la région de QUIMPER que dans celle de BREST.

1. L’ENQUÊTE

Le 26 septembre dernier, vers 16 heures 45, trois individus armés faisaient irruption dans la recette des PTT de Kérentrech -Lanester pres de Lorient, tandis que l’un d’eux coupait les fils téléphoniques,les deux autres. sous la menace de leurs armes, s’emparaient d’une somme de 5000 frs et ne pouvant obtenir du receveur les clés du coffre-fort, prenaient la fuite en bicyclette en direction de la gare de LORIENT. Mais le Receveur les faisait suivre par un jeune cycliste qui désigne l’un d’eux au gardien de la paix LE BELLER de service à proximité de la gare . Celui -ci s’élança à la poursuite du malfaiteur qu’il parvint à faire tomber de sa bicyclette. Se saisissant de lui, il tenta de l’amener au poste de Police lorsque le malfaiteur tira sur lui deux balles de revolver l’atteignant une fois à l’abdomen. Deux autres gardiens survinrent et procédèrent à l’arrestation. Le malfaiteur arrêté déclina ainsi son identité: HERVÉ Raymond, né le 11 mars l9l6 à NANTES, chaudronnier actuellement sans domicile fixe. Il s’agisssait de l’individu qui le 9 septembre précédent, s’était évadé du Palais de Justice de NANTES, au cours de l’interrogatoire que lui faisait subir M. LE BRAS. juge d’instruction. On sait que ce magistrat trouva la mort au cours de l’intervention des complices d’HERVÉ.

Le 27 Septembre à 5 heures, à la suite du premier interrogatoire d’HERVÉ, j’étais alerté par M. MITAINE, commissaire de police à LORIENT. qui me faisait connaître qu’au cours de son interrogatoire, HERVÉ avait révélé qu’un de ses complices de LANESTER était un nommé LE BRIS Eugène, susceptible de se trouver à son domicile à LANRIEC, près de CONCARNEAU. II s’agissait d’un individu dangereux et armé auteur probable de l’assassinat de NANTES. Accompagné de M. le chef d’escadron POUGNANT, du capitaine de Gendarmerie LE THOMAS et de leurs subordonnés, les inspecteurs LE MARCHAND, et LE ROY de mon service, de M. JOUANIC, Commissaire de Police à CONCARNEAU, je me rendis immédiatement à LANRIEC, où l’arrestation de LE BRIS put être opéree sans incident. S’étant mis à nouveau en liaison téléphonique avec mon collègue M. MITAINE, j’appris que M. FOURCADE, Chef de la Sûreté, de NANTES, procédait à LORIENT à l’interrogatoire d’HERVÉ., qu’une confrontation immédiate s’imposait entre ce dernier et LE BRIS. C’est pourquoi je conduisis d’urgence ce malfaiteur à LORIENT, tandis que les investigations se poursuivaient dans la région de CONCARNEAU et que le Capitaine LE THOMAS et l’inspecteur LE ROY de mon service, découvraient. sur indications venues de LORIENT, un important dépôt (3OO kg environ) d’armes et d’explosifs, chez un sieur DAOUDAL, fermier à MELGVEN.

Cependant, l’interrogatoire de LE BRIS se poursuivait à LORIENT, et cet individu reconnaissait être I’auteur de l’attaque à main armée de LANESTER. Il avouait d’autre part, sa participation au meurtre du Juge d’Instruction LE BRAS. Il reconnaissait encore être l’auteur de tous les attentats commis dans la région de CONCARNEAU, et du cambriolage de la Mairie de BEUZEC-CONQ, commis avec la complicité d’HERVE. En outre, il révélait qu’il avait commis un cambriolage d’une firme allemande à CONCARNEAU en compagnie d’un sieur HUON Pierre, membre des Jeunesses Communistes. Il fut procédé sans tarder à l’arrestation de cet individu, qui, interrogé en conséquence, révéla les noms de plusieurs des membres de l’organisation communiste, de CONCARNEAU. Ses déclarations furent complétées par celles du nommé TOQUET Charles, 22 ans, responsable des Jeunesses communistes de CONCARNEAU, qui désigna la plupart des membres de l’organisation dont il était le chef. C’est ainsi que de nombreuses arrestations furent opérées dans la région de CONCARNEAU. Ces arrestations en amenèrent d’autres à QUIMPER, PONT-L’ABBÉ et autres localités.

Mais il convenait de connaître la provenance de l’important stock d’armes et d’explosifs découvert près de MELGVEN. Sur ce point, LE BRIS fit des aveux complets et c’est ainsi que 1’on apprit que des pêcheurs de Léchiagat avaient, à I’instigation d’un sieur LARNICOL Désiré, (ex-maire communiste de TREFFIAGAT) repêché à la drague, à proximité des îles GLÉNAN, le l5 août dernier, cinq bidons métalliques, dits ( containers ‘, reliés par un câble qui, à une date indéterminée, y auraient été mouillés par un sous-marin anglais. L’un des pêcheurs, le sieur BAUDRY, a été arrêté tandis que son complice BODERE prenait la fuite. On apprit encore que les explosifs avaient été entreposés chez BODÉRÉ et que le transport de Léchiagat à MELGVEN chez le fermier DAOUDAL avait été effectué par LE BRIS, et un nommé PRIMA, dans la voiture automobile que conduisait son propriétaire, le sieur. FAUGLAS Pierre, domicilié à CONCARNEAU.

Entre temps, de nouvelles révélations d’HERVÉ et de LE BRIS, recueillies par MM. MITAINE et MARTINEAU, Commissaire Central à LORIENT, permettaient d’orienter l’affaire sur la région de BREST où un grand nombre d’arrestations étaient opérées dans les milieux terroristes et communistes, tandis que M. FOURCADE, chef de la Sûreté à NANTES, procédait, de son côté, à une vaste épuration de la région Nantaise.

L’ensemble de ces opérations permettaient de connaître l’organisation terroriste dans la Région de l’ouest et on apprenait ainsi l’existence dans cette région d’une formation de l’ « Organisation Secrète » (OS) du Parti communiste chargée de perpétrer des attentats et des sabotages à l’aide d’explosifs volés ou fournis par la Grande-Bretagne. HERVÉ et LE BRIS reconnaissaient appartenir à cette organisation, dont le chef, résidant habituellement à NANTES, était un nommé LE PAIH Louis, dit «  Lili », responsable de « l’interrégion » pour l’O.S., tandis que le responsable inter-sections était un nommé PRIMA Jean dit « le Lorintais » résidant le plus souvent à LANESTER près de LORIENT, tous deux auteurs de nombreux attentats. Suivant cette filière, les arrestations étaient opérées des nommés DERRIEN Raoul ( auteur de plusieurs attentats) ROLLAND Albert (auteur de plusieurs attentats) et ABALAIN Albert (auteur d’un vol d’explosif, membre du triangle de direction du Finistère) et président d’un certain ” Tribunal du peuple » chargé de juger les prétendus « traîtres à la solde de l’Allemagne ” et RICHARD Yves, alias RIOUAL (recherché depuis 3 mois pour activité communiste). Ces individus ayant opéré particulièrement dans la région de BREST, sont actuellement détenus à BREST et il ne sera pas rendu compte de leur activité dans le présent rapport.

Par ailleurs l’arrestation à PLEUVEN, d’un instituteur du nom du TRESSARD René, 22 ans, amenait la découverte des auteurs d’attentats ou sabotages divers commis dans la région de PONT-L’ABBÈ depuis plusieurs mois. on se souvient que, dans la soirée du 30 avril 1942, les pneus des automobiles d’une formation allemande stationnée. à PONT L’ABBÉ, avaient été crevés au poinçon. En outre, le 2 mai suivant un attentat était commis contre un pont de chemin de fer nouvellement construit sur la ligne de chemin de fer allant de PONT-L’ABBÉ à TREGUENNEC. A la suite de cet attentat, huit employés de La SNCF avaient été arrêtés par les autorités allemandes puis relâchés. Les auteurs de ces attentats et sabotages ont été découverts et arrêtés avec le concours de la gendarmerie commandée par le Maréchal-des-Logis- Chef JAFFRAY. Ce sont les nommés LAGADIC Louis, GUENNEC Michel, STÉPHAN Marcel, CARIOU Laurent, LE FAOU Jean et DIQUÉLOU Pierre. Ces individus ont en outre reconnu s’être rendus coupables du sabotage d’une bétonneuse et d’une tentative d’incendie à l’usine RAPHALEN à PLONÉOUN-LANVERN.

L’enquête poursuivie dans les mêmes milieux à QUIMPER, nous a permis d’identifier d’ores et déjà les auteurs de plusieurs attentats commis en cette ville, notamment, comme on le verra plus bas, ceux d’une tentative d’attentat commis au mois de juin 1942,contre M. MOREUX délégué des Services de la propagande à QUIMPER et sa famille. L’examen du cas particulier de chacun des individus arrêtés, va nous permettre maintenant d’examiner avec plus de soin le fonctionnement de la vaste organisation de terrorisme de sabotage et de propagande découverte sur notre territoire.

II LES TERRORISTES

Ils ne font pas tous partie de I’O.S. organisation dont l’accès est réservé à des militants éprouvés. Beaucoup sont recrutés dans les cadres du parti communiste, ou des Jeunesses Communistes. Ils sont organisés militairement et agissent sous les ordres d’un «  responsable militaire » encore appelé ” Chef de Sections ‘ (PRIMA). Chaque section se compose de plusieurs groupes et chaque groupe de plusieurs détachements. En outre il existe pour la région un « groupe volant » composé d’individus sans domicile que les membres du parti appellent « les hommes dans le brouillard » ou « dans l’illégalité ». Ce sont eux qui sont chargés des missions les plus dangereuses, ils sont continuellement armés. Les petits sabotages sont laissés aux hommes des « détachements » tandis qu’attaques à main armées, exécutions etc… sont réservées aux membres du « groupe volant ».

1 – LE BRIS Eugène; Corentin, Pierre, Marie, né le l2 juin l9l3 à LANRIEC (Finistère), navigateur, domicilié à LANRIEC, appartenait à ce groupe volant. Il avait adhéré au Parti Communiste à bord du vapeur “WINNIPEG’ de la Cie .France Navigation, en 1936 alors qu’il transportait de MOURMANSK aux ports espagnols, des armes de provenance soviétique destinées à l’armée républicaine. Il était membre de I’O.S. depuis mars 1942, après avoir été avec les nommés LIJOUR et LE CAIGNEC, membre du triangle de direction communiste de CONCARNEAU. Recruté à I’O.S. après une importante activité de propagande, il a reconnu s’être rendu coupable Ces méfaits suivants:

a) En mars 1942: cambriolage d’un dépôt d’explosif de la firme HELLER à QUIMPERLÉ, en compagnie de PRIMA (en fuite) MARC Jean (en fuite) ABALAIN Albert (arrêté) et CORRE Pierre (en fuite) : de l’organisation TODT au lieu-dit « Rouz » au Passage en LANRIEC en compagnie de HUON pierre. Il a tenté de faire sauter les explosifs qu’il ne pouvait emporter, mais n’y est pas parvenu.

b) Fin avril 1942: cambriolage du dépôt d’explosif de la firme HELLER à QUIMPERLÉ, en compagnie de PRIMA (en fuite) MARC Jean (en fuite) ABALLAIN Albert (arrêté) et CORRE pierre (en fuite).

c) ler mai 1942: sabotage de l’Anse du Lin près de CONCARNEAU d’un poste de relais téléphonique.

d) vers le l5 juin 1942: sabotage d’un pylone en béton de la ligne électrique CONCARNEAU-QUIMPERLÉ.

e) 9 septembre 1942: coup de main à NANT’ES sur le cabinet d’Instruction N° 1 et meurtre du Juge d’Instruction LE BRAS.

1) Sabotage au mois de Septembre 1942 d’une pelle mécanique allemande dans la cour de la gare de CONCARNEAU.

g) Cambriolage à CONCARNEAU de I’usine TEYSONNEAU en mars 1942.

h) Mars 1943 – vol de sucre et de conserves aux usines CASSEGRAIN à CONCARNEAU

i) 30 avril 1942 – cambriolage du bureau de l’armement CHARRIER à BEUZEC-CONQ en vue de se procurer une machine à écrire destinée au Parti communiste sur ordre du sieur LIJOUR (en fuite).

i) 24 septembre 1942 – cambriolage en compagnie d’HERVÉ de la Mairie de BEUZEC-CONQ. vol important de tickets d’alimentation, d’une machine à écrire et de cachets à empreintes humides officielles.

k) Le 20 septembre 1942 – coup de main sur le bureau de poste de Kérantrech-Lorient.

C’est I’arrestation de LE BRIS, dénoncé par HERVÉ qui a été le point de départ de la plupart des opérations opérées dans le Finistère. Les révélations ont été importantes et doivent permettre encore d’autres opérations. LE BRIS a été arrêté le 27 septembre 1942.

2 – BAUDIC épouse LOSQ Renée, Marthe, née le 4 juillet 1910 à NANTES, mariée, 7 enfants, sans profession, domiciliée à NANTES, cité Halvêque, 47e rue No 7. Elle était la maîtresse d’HERVÉ et c’est elle qui a fait surveiller par sa fille JANINE, âgé de l4 ans, les abords du Palais de Justice de NANTES, en vue de savoir à quel moment HERVÉ pénètrerait dans le cabinet du Juge d’instruction LE BRAS, et quelle escorte l’accompagnerait. C’est sur ces indications fournies à LE PAIH, instigateur et responsable de l’expédition qu’ont pu être prises toutes les dispositions qui en ont assuré le succès. A la suite de l’assassinat, elle s’était , sur les indications de LE BRIS, réfugiée chez LE BRETON à TRÉGUNC pour se soustraire aux recherches de la police. Elle a été arrêtée le 28 septembre 1942.

3 – BAUDRY Jean, Marie: né le 14 mars l90l à TREFFIAGAT. patron-pêcheur domicilié à LECHIAGAT, copropriétaire du sardinier . « Entre-nous ». S’est chargé, sur les instigations du nommé LARNICOL Désiré et BODÉRÉ Guillaume, du transport des armes et explosifs anglais, des îles GLENAN à TREFFIAGAT, le l5 août 1942, après avoir repêché à la drague les containers dans lesquels ils se trouvaient. BAUDRY ne semble pas avoir fait partie de I’O.S. Il a été arrêté par M. MOREAU, Commissaire de Police Judiciaire, le 30 novembre 1942.

4 – AUTRET épouse BODÉRÉ, Marie-Jeanne, née le l0 avril l9l3 à PONT-L’ABBÉ, ménagère, domiciliée à LECHIAGAT. Elle a recélé à son domicile les cinq containers anglais contenant les armes et les explosifs du 16 au 19 août 1942. C’est elle qui les a remis à LE BRIS. PRIMA et FAUGLAS lorsqu’ils sont venus les chercher.

5 – DAOUDAL Yves Guillaume Marie, né le 3 octobre l89l à MELGVEN, marié, 5 enfants, propriétaire cultivateur. C’est chez lui – avec son consentement – qu’étaient cachés les containers anglais. A titre d’indication, il me paraît utile de donner ici un aperçu du contenu de ces engins, dans lesquels on a découvert : une forte quantité d’explosif plastique, un grand nombre de crayons allumeurs à retardement et de détonateurs, un fort métrage de cordeau Bickford et mèche lente, des détonateurs électriques, des allumeurs à traction, des explosifs spéciaux aimantés pour destruction des automobiles, des pistolets à barillets avec forte provision de cartouches , une mitraillette avec chargeurs et approvisionnements , des fruits, chocolats et bonbons vitaminés, destinés au militants . dans le « brouillard » « , des explosifs sous-marins, des explosifs spéciaux pour destruction de voies ferrées, connus dans la nomenclature jointe aux containers sous le nom de “fog signals” des grenades défensives, des cartouches incendiaires, du cordeau détonant ” CORDTEX,, un grand nombre d’amorces portant la marque ” EXPLOSIVE PRIMER FIEI-D ” des paquets de pansements, boussoles et aimants, de la pâte abrasive pour sabotage des moteurs et même, destiné à un usage inconnu, du ” poil à gratter “.

On peut dire que la saisie de cet important matériel a tué dans l’oeuf un nombre considérable d’attentats en perspective. DAOUDAL a, en outre, donné asile à HERVÉ après l’assassinat du Juge d’Instruction de NANTES. Il s’est donc rendu par là coupable de recel de malfaiteur. Il a été arrêté le 27 septembre 1942, par le Capitaine LE THOMAS et l’inspecteur LE ROY de mon service.

6 – LARNICOL Vincent né le 8 février 1883 à PONT-L’ABBÉ, marié, 5 enfants, tailleur de pierres, demeurant à LESCONIL. Il était l’un des instigateurs de l’expédition aux îles GLENAN au cours de laquelle les containers ont été repêchés. Je I’ai arrêté le 24 septembre 1942 à la suite d’un ordre télégraphique de M. Le Chef du Gouvernement, prescrivant l’arrestation d’individus dangereux. Il est actuellement au camp d’internement de VOVES (E. & L.) d’où il y aura lieu de le faire extraire en vue de procéder à son audition.

7 – TANNIOU Pierre. né le ler décembre 1888 à PONT-L’ABBÉ, tailleur de pierres, domicilié à PONT-L’ABBÉ. Il n’a participé à aucun attentat, mais sa maison servait d’asile aux membres de I’O.S. en déplacement à PONT-L’ABBÉ. C’est chez lui que se répartissaient les tracts destinés à la région de PONT-L’ABBE. C’est chez lui également qu’ont été remis aux Jeunesses Communistes de PONT-L’ABBÉ des explosifs destinés aux attentats mentionnés plus haut. Il a été arrêté le 6 octobre 1942, par M. MOREAU, Commissaire de Police Judiciaire.

8 – HUON Pierre. né le 15 octobre 1923 à BEUZEC-CONQ, marin-pêcheur, domicilié à BEUZEC-CONQ, 20 rue Dupetit Thouars. Membre des Jeunesses Communistes, il s’est livré à d’importantes diffusions de tracts communistes. En outre, il a reconnu avoir assisté LE BRIS dans le cambriolage d’une firme allemande du «  Rouz » du Passage LANRIEC. fin avril 1942 . Trente kilogrammes de «  Martinité Antigel ” ont été ainsi dérobés. En outre, HUON a tenté, avec LE BRIS, de faire sauter le reste des explosifs du dépôt. Il a été arrêté par M. JOUANNIC. Commissaire de Police à CONCARNEAU, assisté de son personnel et d’inspecteurs de police judiciaire et de mon service le 28 septembre 1942.

9 – LAGADIC Louis, Noël Marie, né le 5 mai 1922à PONT-L’ABBÉ, Célibataire, chauffeur, domicilié, route de Quimper à PONT-L’ABBÉ. I1 semble qu’il ait été membre de I’O.S. Le 1er mai 1942,il a saboté le pont de TRÉGUENNEC près de PONT-L’ABBÉ, à l’aide d’une bombe composée de 50 cartouches de dynamite plastique. Le 2l juin 1942, il a saboté un transformateur électrique au lieu dit “Pen Henez” à l’aide d’une bombe composée de douze cartouches de dynamite plastique. Le 20 septembre 1942, il a tenté de mettre le feu à l’usine de conserve RAPHALEN de PLONÉOUR-LANVERN. Il a été arrêté le l6 octobre 1942.

10 – GUENNEC Michel, Corentin, Marie, né le 4 septembre 1923 à PONT-L’ABBÉ, célibataire, mécanicien, domicilié, route de QUIMPER à PONT-L’ABBÉ. Responsable du triangle de I’O.S. à PONT-L’ABBÉ, avec LAGADIC et CALVEZ (v. infra). Co-auteur de l’attentat visant à détruire le pont de chemin de fer de TRÉGUENNEC le 30 avril 1942; co-auteur également du sabotage du transformateur électrique de ” PEN-HENEZ » “. Il approvisionnait ses complices en explosifs. Il a reconnu en outre avoir effectué de nombreuses diffusions de tracts communistes. A été arrêté le 16 octobre 1942.

11 – STÉPHAN Marcel, né le 15 octobre 1923, à PONT-L,ABBÉ. célibataire, menuisier, domicilié à « MENEZ ROZ » en PONT-L’ABBÉ, membre du triangle de direction de l’O.S. avec Laurent CARIOU et Fernand LARNICOL. Etait en dernier lieu, chef d’un groupe de « Franc-tireurs patriotes » (F.T. P. ) Il était approvisionné par PRIMA en explosifs et il a tenté de détruire un transformateur électrique le 22 juin l942 au lieu dit ” PEN HENEZ » , avec la complicité de LAGADIC et de GUENNEC. Nombreuses diffusions de tracts. Il a été arrêté le 14 octobre 1942.

10 – GUENNEC Michel, Corentin, Marie, né le 4 septembre 1923 à PONT-L’ABBÉ, célibataire, mécanicien, domicilié, route de QUIMPER à PONT-L’ABBÉ. Responsable du triangle de I’O.S. à PONT-L’ABBÉ, avec LAGADIC et CALVEZ (v. infra). Co-auteur de l’attentat visant à détruire le pont de chemin de fer de TRÉGUENNEC le 30 avril 1942; co-auteur également du sabotage du transformateur électrique de ” PEN-HENEZ » “. Il approvisionnait ses complices en explosifs. Il a reconnu en outre avoir effectué de nombreuses diffusions de tracts communistes. A été arrêté le 16 octobre 1942.

11 – STÉPHAN Marcel, né le 15,octobre 1923, à PONT-L,ABBÉ. célibataire, menuisier, domicilié à « MENEZ ROZ » en PONT-L’ABBÉ, membre du triangle de direction de l’O.S. avec Laurent CARIOU et Fernand LARNICOL. Etait en dernier lieu, chef d’un groupe de « Franc-tireurs patriotes » (F.T. P. ) Il était approvisionné par PRIMA en explosifs et il a tenté de détruire un transformateur électrique le 22 juin l942 au lieu dit ” PEN HENEZ, avec la complicité de LAGADIC et de GUENNEC. Nombreuses diffusions de tracts. Il a été arrêté le 14 octobre 1942.

12 – BARIL Marcel, Raymond, né le 5 juin 1925 à ANGERS (Maine-et-Loire) apprenti de la S.N.C .F. domicilié rue de la Liberté à ERGUÉ-ARMEL (Finistère). Il a été acquitté récemment par arrêt de la Section Spéciale de la cour d’Appel à RENNES, comme ayant agi sans discernement, dans une affaire de détention d’un stock important de tracts communistes. Une nouvelle enquête effectuée sur son compte a établi que, membre du Front National et diffuseur de tracts de cette inspiration, il avait en outre, commis un attentat par explosif le 22 juin l942 contre le local de la Légion des volontaires Français contre le Bolchevisme, à QUIMPER. Les explosifs lui avaient été remis par le nommé QUINIOU André -Yves, arrêté par mon service le l7 juillet 1942 et décédé depuis lors. Il était en outre membre d’un « Groupe Paul COLETTE ” à QUIMPER. Il a été arrêté le 20 octobre 1942 par M. MOREAU, commissaire de police Judiciaire assisté des inspecteurs de mon service.

13 – LE ROY François, Marie, né le 14 août 1922 à PARIS (XIIIe) auxiliaire des P.T.T., domicilié à KERFEUNTEUN (Finistère) 106 Grand-Rue. Il était responsable des jeunesses communistes à QUIMPER depuis la mort de QUINIOU et responsable du « Groupe Paul COLETTE “. Il est l’auteur présumé de l’attentat commis contre M.MOREUX, délégué départemental de la propagande et sa famille. Bien que les plus solides présomptions existent à ce sujet, il n’a pu être encore entendu sur ce point, étant actuellement à I’hôpital-hospice de QUlMPER. Il a été arrêté le 8 octobre 1942.

III .LES SABOTEURS

Ils se recrutent uniquement parmi les jeunesses communistes et ils ne font en général pas partie de l’O.S. Leur participation se borne à des sabotages de faible importance.

14 – DIQUELOU Pierre Marie, né le 22 août 1923 à PONT-L’ABBÉ, célibataire, manoeuvre, domicilié, route de Plonéour à PONT-L’ABBE. II était membre des jeunesses communistes et avait effectué en cette qualité de nombreuses diffusions de tracts. Vers la mi-septembre 1942 approvisionné en explosifs par PRIMA, il a fait sauter une bétonneuse à l’aide de trois cartouches de plastiques, et d’un crayon allumeur à retardement à PONT-L’ABBÉ dans une firme allemande. il a été arrêté le 16 octobre 1942.

15 – LAUTRÉDOU Hervé, né le 13 février 1919 à PLONÉOUR LANVERN, célibataire. Sans profession, domicilié à PLONÈOUR-LANVERN, route de l’Ecole libre. Il était membre.des Jeunesses communistes. Le 20 septembre 1942, il a participé à la tentative d’incendie de l’USINE RAPHALEN à PLONÉOUR-LANVERN. Il convient de préciser au sujet de cet attentat que les auteurs avaient emporté neuf cartouches d’explosifs plastiques et deux crayons allumeurs à retardement, en vue de faire sauter les frigorifiques de l’usine. N’ayant pu s’introduire dans l’usine, ils ont dû renoncer à ce projet et se borner a une tentative d’incendie des fûts vides. Au retour, ils ont perdu sur les lieux leurs crayons allumeurs, qui ont été retrouvés lors de l’enquête. LAUTREDOU a été arrêté le l6 octobre 1942.

16. – QUENET Raymond, né le 6 octobre l922 à PONT-L’ABBÉ, célibataire. cuisinier. domicilié à MENEZ-ROZ-HASTFL en PONT-L’ABBÉ. Il était membre des jeunesses communistes et diffuseur de tracts. Il a fait partie de l’expédition contre l’usine RAPHALEN le 20septembre 1942. Il a reçu des mains de STEPHAN neuf cartouches d’explosif plastique et deux crayons allumeurs. L’explosif a été découvert à son domicile (enterré dans son jardin) sur ses indications lors de la perquisition qui a suivi son arrestation le l7 octobre 1942.

11 – CALVEZ Jules, Enéour, Marie, né le 29 août à PONT-L’ABBÉ, célibataire, tailleur d’habits, domicilié à MENEZ-ROZ, commune de PONT-L’ABBÉ, membre des jeunesses communistes. A participé à l’expédition contre l’usine RAPHALEN en PLONEOUR-LANVERN.Il faisait partie du triangle du T.P.F. mentionné plus haut. Il a été arrêté le 18 octobre 1942.

18 – LE FAOU Jean, né le 1er mars 1917 à PONT-L’ABBÉ, plâtrier .domicilié à PONT-L’ABBÉ, rue Jean-Jaurès. Il était membre d’un triangle de Francs-tireurs Patriotes des jeunesses communistes avec Fernand LARNICOL et BERNARD Yves. C’est lui qui a préparé les poinçons ayant servi à la crevaison des pneus des camions allemands, Place de la République â PONT-L’ABBÉ, dans la nuit du 30 avril 1942 et il a lui-même participé à l’action. Il est temps de mentionner à propos de ce sabotage, qu’à la suite des divers attentats commis à PONT-L’ABBÉ vers le 1er mai 1942, un grand nombre d’arrestations eut lieu dans cette ville. Elles furent pratiquées par la Police allemande, assistée de détachements de la Troupe qui cernait les maisons. En outre, en représailles , l’heure du couvre-feu fut avancée. LE FAOU a été arrêté le l6 octobre 1942.

19 – CARIOU Laurent, né le 12 octobre 1923 à PONT-L’ABBÉ, célibataire employé de bureau, domicilié à PONT-L’ABBÉ, rue Thiers. Il était responsable des jeunesses communistes de PONT-L’ABBÉ, et, en cette qualité, diffuseur de tracts. Il a participé le 30 avril 1942 à la crevaison des pneus de voitures allemandes à PONT-L’ABBÉ. Il a été arrêté le 9 octobre 1942.

20 – LE GALL Joseph, né le 23 novembre 1920 à BEUZEC-CONQ. célibataire, couvreur domicilié à BEUZEC-CONQ. Il était membre des jeunesses communistes; et il a participé à un sectionnement de fils téléphoniques à CONCARNEAU en compagnie de TOQUET, TRICHARD et LIJOUR à la fin de juin 1942. ll a été arrêté le 3 octobre.

21 – TRICHARD Yves Gabriel, né le 25 novembre l9l9 à BEUZEC- CONQ célibataire, auxiliaire de la S.N.C.F. domicilié 26 Avenue de la Gare à CONCARNEAU. Membre des jeunesses communistes. Il a participé avec le précédent au sabotage précité. Il a été arrêté le 3 octobre 1942.

22 – TOCQUET Charles, né le 30 mars à BEUZEC-CONQ employé à la S.N.C.F., célibataire, domicilié à BEUZEC-CONQ, il était responsable des jeunesses communistes et a, en cette qualité, procédé à de nombreuses diffusions de tracts, collage de papillons et inscriptions sur les murs. Il a participé à l’attentat précisé. Ses révélations très importantes ,ont permis de très nombreuses arrestations. C’est lui, notamment, qui a livré les noms de la plupart des membres des jeunesses communistes de CONCARNEAU.

IV. LES MEMBRES DU PARTI COMMUNISTE

Un certain nombre des membres de ce parti ont été arrêtés à la suite des révélations faites par les précédents. ces individus n’ont commis aucun attentat ni sabotage mais ils doivent être considérés comme inspirateurs de la plupart de ces méfaits qu’ils laissaient commettre à des jeunes gens agissant le plus souvent sans beaucoup de discernement . Notre enquête montre que si ces derniers ont le plus souvent agi à la légère, sans très bien comprendre la gravité des actes qu’ils commettaient, à la sévérité du châtiment qu’ils encouraient, et les conséquences très graves de leurs méfaits, il n’en va pas de même des individus qui, restés dans l’ombre, obtenaient par eux la révélation des plans mûris , sans aucun doute, hors de notre territoire. L’examen de chaque cas particulier va nous éclairer à ce sujet.

23 – FAVENNEC, épouse FAULGLAS Anne-Marie. née Ie 17 avril 1911 à MOËLAN-SUR-MER (Finistère) mariée , un enfant, institutrice détachée de l’E.P.S. de CONCARNEAU, domiciliée rue Vulcain à BEUZEC-CONQ. Elle prétend n’avoir jamais adhéré au parti communiste mais reconnaît. avoir eu une importante activité en faveur de ce parti. Elle était en liaison avec LE BRIS, et elle n’ignorait rien des attentats qu’il commettait. Elle reconnaît avoir reçu la visite d’un nommé GEORGES dont l’activité est souvent mentionnée par les précédents, et qui, selon toute vraisemblance, appartient au comité central du Parti Communiste où on le désigne sous le pseudonyme de « Vieux Georges ».Institutrice en grève en 1938 , elle a amené son mari, le sieur FAUG.LAS Pierre (en fuite) au communisme et c’est lui qui, le l6 août, transporta dans sa voiture les containers anglais de Léchiagat à MELGVEN. Au cours d’une perquisition faite chez elle, la voiture ayant servi à ce transport a été saisie et les plaques minéralogiques , portant des numéros recouverts à la peinture noire, mises sous scellés ,ainsi que des objets emportant conviction. La femme FAUGLAS a été arrêtée le 1er octobre 1942, sa déposition est édifiante en ce qui concerne les procédés de terreur que faisaient régner certains hauts militants au sein du parti communiste

24. HUON Joseph, né le 30 octobre 1918 à BEUZEC-CONQ, célibataire manœuvre domicilié à CONCARNEAU, 20 rue du Petit Thouars , membre du parti communiste, diffuseur de tracts . Son activité est bien moindre que celle de la précédente. Son cas , unique dans cette affaire, semble être celui d’un militant peu enthousiaste , enthousiaste . agissant par crainte de représailles. Son activité s’est bornée à receler chez lui la machine à écrire

25 – LE GOFF épouse LIJOUR Lucie, née le 7 octobre 1909 à RIEC-SUR-BELON (Finistère) mariée, sans enfants, établie mercière à CONCARNEAU, 64 avenue de la Gare. Nous aurions pu la faire figurer dans la liste des terroristes. En effet, il a été établi qu’elle servait d’agent de liaison à son mari, et que c’est souvent par elle que LE BRIS recevait les ordres émanant de I’O.S. Elle était avec TANNIOU dont le cas est examiné plus haut, la seule militante qui n’a passé aucun aveu dans cette affaire. Bien qu’étant l’assistante directe de son mari, dont l’affaire sera examinée plus bas, elle a été arrêtée le 28 septembre 1942.

26 – LE GAIGNEC Eugène, né le 1er juillet 1897 à KERYADO (Morbihan) marié, 4 enfants, manoeuvre, domicilié à BEUZEC-CONQ , 68 avenue de la Gare, Comme LARNICOL Vincent, il a été arrêté préventivement le 24 septembre 1942 et il se trouve actuellement au camp d’internement de VOVES. Il n’a pas encore été extrait ni interrogé .mais on sait d’ores et déjà qu’il faisait partie avec LIJOUR, du triangle de direction du Parti Communiste à CONCARNEAU. Son fils a été arrêté avec les jeunesses communistes de cette ville dans les circonstances qui éclairaient la neutralité des parents qui l’ont élevé. (Voir chapitre des jeunesses communistes).

27 – LE BOURHIS Jean-Yves, né le 28 juillet 1894 à PLOUHINEC (Morbihan) marié, deux enfants, employés à la S.N.C.F. domicilié à la gare de DOUARNENEZ. Arrêté comme le précédent le 4 septembre 1942, il se trouve actuellement à VOVES. Il a été établi qu’il recevait les tracts communistes destinés à la région de DOUARNENEZ. Ces tracts étaient expédiés par le nommé HARRÉ dont le cas est examiné plus bas.

28 – LASTENNET Hervé, dit “MICKEY” né le 7 lévrier l9l5 à BREST, manoeuvre domicilié rue des Ecoles à PONT-DE-BUIS. Arrêté également le 24 septembre 1942 se trouve actuellement au camp d’internement de VOVES d’où il conviendra de le faire extraire. en vue de l’entendre sur l’ensemble des attentats commis dans la région de PONT-DE-BUIS, dont on sait d’ores et déjà qu’il est l’instigateur sinon, pour certains tout au moins, l’auteur principal.

29 – HARRÉ François Marie, né le l7 juin 1890 à LOCRONAN Finistère) marié, deux enfants, chauffeur à la S.N.C.F. domicilié 4 Allée des Primevères à KERFEUNTEUN. Il s’est défendu d’avoir adhéré au parti communiste mais il reconnaît avoir eu une activité importante en faveur de ce parti, auquel il témoignait sa sympathie dans le temps de paix. En effet il a été établi qu’il recevait à son domicile d’importants agents de liaison du parti communiste notamment le « Vieux-Georges » et deux femmes connues par les prénoms de ” MONIQUE et JACQUELINE. En outre il recevait des tracts pour toute la région par caisse dont le poids variait entre 30 et 50 kg. L’une des ces caisses pesant 56 kg a été découverte en gare de QIIIMPÉR. Deux autres de 50 kg chacune, ont été saisies en gare de PARIS-VAUGIRARD. La 13e. Brigade de police Judiciaire, enquête actuellement sur deux individus habitant PARIS, qui étaient en liaison avec lui. HARRÉ a été arrêté le 8 octobre let le 13 octobre au cours d’une interruption de son audition, HARRÉ s’est pendu dans sa cellule à l’aide d’une ceinture de flanelle. Tous les efforts pour le ramener à la vie sont demeurés vains.

V. LES JEUNESSES COMMUNISTES

Les révélations faites, tant par les membres de I’O.S. (recrutés comme je l’ai montré le plus souvent parmi les jeunesses communistes) que par les membres du parti communiste ont permis de découvrir les auteurs de toutes les distributions de tracts effectuées depuis plusieurs mois et de les déférer à la Justice.

30 – TRESSARD René, né le 19 octobre 19l9 à QUIMPER célibataire, instituteur public domicilié à PLEUVEN. Il était responsable des jeunesses communistes du Sud-Finistère. C’est lui qui répartissait dans les diverses sections placées sous son autorité. Il était en liaison avec le Sud-Finistère ainsi qu’avec le « Vieux-Georges », MONIQUE et HARRÉ. Il avait sous sa coupe le militant QUINIOU André, qui assurait la liaison entre le . Front National et les Jeunesses Communistes. Il a été arrêté le 3 octobre 1948 par Monsieur MOREAU commissaire de Police Judiciaire.

3l – BERNARD Jean-Charles, né le 15 juin 1923 à PONT-L,ABBÉ employé auxiliaire d’administration demeurant à QUIMPER au Frugy. Il était, responsable des jeunesses communistes d’abord de PONT- L’ABBE, puis de QUIMPER. Il se tenait en liaison avec MONIQUE, JACQUELINE, LAURENT CARIOU, J. LIVER et le Vieux Georges. C’est lui qui a créé à PONT-L’ABBÉ le premier groupe de I’O.S. mais il ne semble pas en avoir fait partie. Il a été arrêté le l0 octobre.

32 – LOUBOUTIN Pierre, né le 13 janvier 1922 à POULDAVID, célibataire, marin-pêcheur, domicilié à PLOARÉ. Il était chef du groupe de Jeunesse communiste de DOUARNENEZ. A ce titre. il a effectué des distributions de tracts. Il a été arrêté le 10 octobre 1942.

33 – LE GAIGNEZ François, né te 22 décembre 1924 à KERYADO (Morbihan), célibataire mécanicien, domicilié à BEUZEC-CONC, 5l Avenue de la Gare. Il était membre des jeunesses communistes de CONCARNEAU. A la suite de l’arrestation de plusieurs de ses camarades il éprouva le besoin de couvrir les murs de GONCARNEAU d’inscriptions à la peinture rouge , « A bas LAVAL, nous voulons du pain » etc… L’enquête menée à CONCARNEAU par Monsieur JOUANNIC commissaire de Police de cette ville en collaboration avec l’inspecteur LE MARCHAND de mon service, permit son arrestation le 6 octobre 1942 , le jour même ou les inscriptions avaient été découvertes.

34 – COÏC Arsène, né le l5 avril 1922 à TREFFIAGAT, célibataire, domicilié à la pointe de TREFFIAGAT. Il était membre des jeunesses communistes et agent de liaison entre les divers chefs du groupe de la région. Il a été arrêté le 16 octobre 1942.

35 – TROLEZ Jean-Marie, né le 2 juin 1922 à BEUZEC-CONQ, auxiliaire de la S.N.C.F. domicilié l8 Avenue de la Gare à BEUZEC-CONQ. Il était membre des jeunesses communistes à CONCARNEAU et assurait la diffusion des tracts. Il a été arrêté le 3 octobre 1942.

36 – BOURBIGOT Jean-Louis-Jacques, né le 13 février l923 à BEUZEC-CONQ, célibataire, boulanger demeurant lg Avenue de la Gare à BEUZEC-CONQ, Il était membre des jeunesses communistes et il était plus spécialement chargé des collages de papillons séditieux. Il a été arrêté le 3 octobre 1942.

37 – BARGAIN Louis, né le 9 octobre 1922 à GOUÉRON (Loire inférieure), célibataire, forgeron, domicilié à PONT-L’ABBÉ, route de PLONÉOUR. Il était membre des jeunesses communistes et. en cette qualité, participait aux diffusions de tracts. Il a été arrêté le l6 octobre 1942.

38 – LOUARN Théophile, né le ler février 1921 à CONCARNEAU, manoeuvre, domicilié 13, rue des Remparts à CONCARNEAU. Il était membre des jeunesses communistes et diffuseur de tracts. Il a été arrêté le 3 octobre 1942.

39 – PÉRON Albert, né le 25 novembre l9l4, à BEUZEC-CONQ, célibataire, manoeuvre, domicilié 83 avenue de la Gare à BEUZEC- CONQ. Membre des jeunesses communistes, il assurait la diffusion des tracts. Il a été arrêté le 28 septembre 1942.

40 – KERDRANVAT Pierre, né le 29 avril 1922 à PLUGUFFAN (Finistère) auxiliaire des P.T.T., domicilié rue Miossec à QUIMPER . Lors de l’arrestation du nommé LE Roy (voir plus haut no l3) et alors que le service perquisitionnait à son domicile, KERDRANVAT fit irruption dans une des pièces du rez-de-chaussée pour prévenir LE ROY que la police était à sa recherche. Arrêté et interrogé, il reconnut être membre des jeunesses communistes et diffuseur de tracts. Arrêté le 8 octobre 1942.

41 – MERRIEN François , né le 16 février 1921,à PAIMPOL (Côtes-du-Nord), instituteur public, domicilié à SAINT-PIERRE-PENMARCH (Finistère). Il a été désigné par ABALAIN Albert, comme ayant fait partie avec lui d’un triangle de direction à PONT-DE-BUIS, triangle complété par LASTENNET (voir plus haut no 28). MERRIEN qui reconnaissait avoir fait partie des jeunesses communistes avant la guerre, se défend énergiquement d’avoir milité depuis les hostilités. Seule une confrontation avec ABALAIN et LASTENNET permettra de faire un sort à sa sincérité. Il a été arrêté le 14 octobre 1942.

42 – CLÉRON Bertrand, né le 14 février 1920 à SCAER, cultivateur, domicilié à SCAËR. Il faisait partie des jeunesses communistes. Son activité s’est bornée au recrutement de nouveaux adhérents. Il a été arrêté le 6 octobre 1942.

43 – CARIOU Corentin Marie, né le 2l décembre 1922 à Loctudy, plâtrier domicilié à LOCTUDY. Il était membre des jeunesses communistes. Il y cotisait et recevait des tracts de CARIOU Laurent. Il prétend ne les avoir pas distribués. Il a été arrêté le l6 octobre 1942.

44 – DELLIOU Charles, né le ler septembre 19l8 à BEUZEC-CONQ, célibataire, manoevre, domicilié à BEUZEC-CONQ, 39, rue Dupetit Thouars. A reçu divers tracts communistes des mains de LE HUON Joseph (voir plus haut N° 24) il refuse de dire ce qu’il a fait. Il a été arrêté le 28 septembre 1942.

45 – GUENNEC René, Corentin. né le 11 février 1922 à PONT- L’ABBÉ, manoeuvre, domicilié route de QUIMPER à PONT-L’ABBÉ. Il était inscrit à la section des jeunesses communistes à PONT-L’ABBÉ, où il cotisait. Il prétend n’avoir jamais distribué de tracts. Il a été arrêté le l6 octobre 1942.

VI. LES MEMBRES DU FRONT NATIONAL.

L’enquête a révélé l’existence , parallèlement aux organisations de jeunesse communiste , d’une formation du « Front National » dont l’existence ne s’est guère manifestée qu’à QUIMPER .En outre , on a vu que , sous l’inspiration de QUINIOU , un groupe s’intitulant «  Groupe Paul Colette » s’était organisé dans cette ville.Une enquête approfondie est en cours au sujet de ces organisations auxquelles on peut d’ores et déjà imputer plusieurs attentats, ainsi que le montre l’examen de la situation de ses adhérents. A certains égards, le « Groupe Paul Colette » apparaît comme I’O.S. du Front National. Il n’y a pas lieu de revenir sur l’activité de deux de ses membres, les nommés LE ROY François (dont l’activité est analysée au paragraphe 13) et de BAREL Marcel (examiné au paragraphe l2).

46 – DOARÉ Jérôme, né le 6 septembre 1922 à PENHARS, chauffeur d’auto domicilié à PENHARS, moulin de Tréguer. Il se trouve actuellement à AGEN, en instance de départ pour ALGER, à la suite d’un engagement volontaire au 4e Zouave. Il fait l’objet d’un mandat d’arrêt de Monsieur le Juge d’Instruction de QUIMPER. En effet, il a été établi par les déclarations de BAREL qu’il était l’auteur des attentats commis le ler mai dernier contre la caserne de la Tour d’Auvergne et le soldatenheim à QUIMPER. Il était membre du “Groupe Paul COLETTE”.

47 – CIROUA Marcel, né le25 juin 1924 à BOURSAY SAINT-AGIL (Loir et Cher), mécanicien, domicilié à QUIMPER, P.N. 514. Il a reconnu avoir reçu et diffusé des tracts du ” Front National ” que lui remettait BAREL. Il faisait partie du .Groupe Paul COLETTE. Il a été arrêté le 27 octobre 1942.

48 – SANQUER Louis André, né le 28 mars 1924 à TOURS, serrurier, domicilié à QUIMPER, 34, route de Rosporden. Il était membre du Front National et du groupe “Paul COLETTE’. Il reconnaît avoir diffusé des tracts du ” Front National “. Il a été arrêté le 23 octobre 1942.

49 – MELLON André, né le 12 mars 1926 à MORLAIX, employé de commerce, domicilié 15, rue Croix-St-Yves à QUIMPER. I1était chef de section du ” Front National ‘ et il reconnaît avoir distribué des tracts se réclamant de cette obédience. Vu son jeune âge, il a été laissé en liberté provisoire et il est soumis à une très stricte surveillance. Comme je l’ai dit, une très importante enquête reste à faire à ce sujet, dont je ne tarderai pas à vous communiquer les résultats.

VII LES INDIVIDUS EN FUITE

En dépit de la progression rapide de l’enquête, il n’a pu être évité que certains individus se soustraient à l’action de la justice en prenant la fuite. Il convient aussi d’ajouter que si les arrestations faites le 24 septembre dernier, en vertu d’un ordre télégraphique, émanant de M. Pierre LAVAL, chef du Gouvernement, ont permis d’arrêter comme on l’a vu plus haut plusieurs individus contre qui des charges certaines sont venues étayer les graves présomptions qui avaient motivé leur arrestation, d’autres individus, moins connus de mes services, ont vu dans cette opération une menace qu’ils ont réussi à parer en prenant la fuite plusieurs jours avant la déclenchement de l’action judiciaire dont il est ici rendu compte. C’est le cas de chacun de ces individus qu’il convient maintenant d’examiner.

50 – PRIMA Jean-Louis, né le l7 octobre l911 à LANESTER (Morbihan), célibataire, commis épicier, sans domicile fixe. Comme on l’a vu plus haut, PRIMA accompagnait HERVÉ et LE BRIS lors du coup de main de LANESTER et la procédure a établi qu’il était l’auteur d’une douzaine d’attentats commis à LORIENT et région. En outre, c’est lui qui à BREST, était l’exécuteur lors de la tentative d’assassinat du brigadier GUIVARCH. Il était responsable militaire de la région sous les ordres de LE PAIH Louis (responsable interrégion). Après l’attaque du bureau de poste de KERANTRECH-LANESTER, PRIMA avait enregistré sa bicyclette en gare de LORIENT, à destination de LANDERNEAU. Un piège fut tendu à la gare de cette localité, mais ce fut un nommé DERRIEN Raoul (terroriste dangereux) auteur de nombreux attentats qui s’y fit prendre. On apprit que PRIMA s’était rendu à BREST et que par l’intermédiaire du nommé ROLLAND Albert, (autre dangereux terroriste arrêté depuis lors) il avait fait parvenir à DERRIEN le récépissé de bagage qui avait permis à ce dernier de retirer la bicyclette en gare de LANDERNEAU. PRIMA fait l’objet de très actives recherches. Son signalement a été diffusé.

5l – LARNICOL Désiré, né le 3 mai 1906 à SAINT-JEAN-TROLIMON (Finistère), marin-pêcheur domicilié à LÉCHIAGAT. C’est lui qui, en Compagnie de BAUDRY a procédé au repêchage des containers, et il les a transportés à son domicile où ils sont restés trois jours. il a pris la fuite le 30 septembre, jour même où M. MOREAU, commissaire de Police Judiciaire s’était rendu à LECHIAGAT pour I’arrêter. Il est activement recherché et son signalement a été diffusé.

53 – FAUGLAS Pierre, né le 1er février l9l0 à MOËLAN-SUR-MER, reformé de la marine, domicilié à BEUZEC-CONQ, rue Vulcain. c’est lui qui a assuré avec sa voiture automobile, muni d’un faux ausweis et de faux numéros, le transport des containers anglais de LECHIAGAT à MELGVEN à la ferme DAOUDAL. Il a pris la fuite le 1.. octobre 1942 sur les conseils de sa femme qui avait appris l’arrestation de DAOUDAL .Il est activement recherché et son signalement a été diffusé.

54 – LIJOUR René, né le 25 octobre 1900 à BEUZEC-CONQ, négociant domicilié à CONCARNEAU, avenue de la gare. Il était responsable du parti communiste à CONCARNEAU. Il était en rapport avec le ” Vieux-Georges », MONIQUE et JACQUELINE. Il transmettait les ordres de I’O.S. à LE BRIS. C’est lui qui l’a initié au maniement des explosifs. En outre, c’est sur son ord.re et sous sa surveillance que le jeune TOCQUET (voir supra N” 22) a commis un sabotage de ligne téléphonique. LIJOUR a pris la fuite lors des arrestations préventives du 24 septembre. Il est activement recherché et son signalement a été diffusé.

55 – LE BRETON Jean-Marie, né le 6 octobre 1898 à MELGVEN (Finistère), marié, un enfant, retraité de la S.T.C.R.P., domicilié à TREGUNC. C’est lui qui a creusé le souterrain ayant servi à cacher les tickets d’alimentation et la machine à écrire volée à BEUZEC-CONQ par LE BRIS et HERVÉ. Il a pris la fuite le 28 septembre l942.Il est activement recherché et son signalement a été diffusé.

56 – LARNICOL Fernand, né à QUIMPER, le 20 décembre 1922, domicilié Place du Champ de Foire à QUIMPER. Il appartenait au triangle de direction des jeunesses communistes de PONT-L’ABBÉ. Il a pris la fuite le l6 octobre 1942. Il est recherché.

51 – CLÉRON Maurice, né le l2janvier 1924 à SCAËR, célibaraire, domicilié à MENEZ-GUERVEUR en SCAËR. Il était chef de la section des jeunesses communistes de SCAËR. On le considère comme l’auteur de plusieurs sabotages commis dans cette région, notamment du sectionnement des fils téléphoniques de la ligne particulière de M. MONFORT, député maire de SCAËR. Il est activement recherché et signalé.

VIII . LES AFFAIRES ANNEXES

Les diverses recherches faites dans cette affaire ont permis de découvrir les auteurs de plusieurs méfaits jusqu’alors restés impunis.

58 – LE SERGENT, épouse LE BRETON Marie, née le 24 mars 1900 à QUISTINIC (Morbihan), domiciliée à TRÉGUNC (Finistère). C’est chez elle que LE BRIS avait caché divers objets volés au cours de cambriolages dont il était l’auteur. C’est également elle qui a recelé les tickets d’alimentation et la machine à écrire volée par LE BRIS et HERVÉ. Ces objets étaient cachés dans un abri souterrain creusé par son mari dans le jardin attenant à leur habitation. Ils ont été découverts par l’inspecteur LE ROY, lors d’une perquisition. La femme LE BRETON, bien qu’elle s’en défende, appartenait au parti communiste. Elle était en liaison avec LIJOUR et sa femme. Elle a été arrêtée le 28 septembre 1942.

59 – THOMAS Yves André, né le l0 juin 1904 à CONCARNEAU, marié, deux enfants, chauffeur de l’organisation TODT, domicilié 21,rue Bayard à CONCARNEAU. Ex-conseiller municipal communiste de CONCARNEAU, il a été trouvé en compagnie de LE BRIS lors de l’arrestation de ce dernier. Il a avoué qu’il se cachait à la ferme LE BRIS, de crainte d’être arrêté. Il ne semble pas être mêlé à l’affaire judiciaire, mais il s’agit d’un individu dangereux. Il semble qu’il y ait lieu de prévoir pour lui une mesure administrative. Il a été arrêté le 27 septembre 1942.

60 – LE FÉ Henri, né le 9 août l9l8 à CONCARNEAU, marié, un enfant, marin-pêcheur, domicilié, 17, rue Malakoff à CONCARNEAU.A la suite de révélations de LE BRIS, il a avoué sa complicité dans divers cambriolages commis à CONCARNEAU. En outre, il semble qu’il soit membre du parti communiste. il a été arrêté le 19 octobre 1942 par M. JOUANNIC, Commissaire de Police de CONCARNEAU.

61 – SOUIN Paul, né le 26 avril t904 à CONCARNEAU, marié, sans enfant, marin-pêcheur, domicilié 9, boulevard de Bougainville, à CONCARNEAU. Il a été arrêté pour les mêmes faits que le précédent.

62 – GRALL Eugène, né le 16 novembre 192l à CONCARNEAU, célibataire, manoeuvre, domicilié, 1, rue Amiral Courbet, à CONCARNEAU. Il a été arrêté pour les mêmes faits que le précédent.

IX LES SUITES JUDICIAIRES

Tous ces individus (sauf les trois derniers) ont été écroués à la Maison d’Arrêt de QUIMPER en exécution des mandats de dépôt administratifs par vous délivrés. quelques-uns ont déjà été déférés à Monsieur le Procureur de I’Etat Français à QUIMPER, par M. MOREAU, commissaire de Police Judiciaire, qui agissait dans cette affaire en vertu d’une commission rogatoire de M. HERVÉ, Juge d’Instruction à QUIMPER. Il convient de saisir la justice des affaires relatives aux autres individus impliqués. J’ai l’honneur de vous transmettre joints au présent, les procès-verbaux d’enquête qui leurs sont relatifs.

CONCLUSIONS

Cette affaire à permis de décapiter sur notre territoire, une vaste entreprise spécialisée dans les menées anti-nationales à QUIMPER , à LORIENT, à BREST, à NANTES, de nombreuses arrestations ont été opérées et des stocks importants d’armes et d’explosifs découverts et saisis.

En outre, une importante moisson de renseignements a été faite pour l’avenir. Il n’y a pas de doute que cette affaire ait portée à l’appareil clandestin du parti communiste illégal un coup dont il aura peine à se remettre dans la région.

D’ores et déjà, un grand nombre de militants sont identifiés et d’autres arrestations suivront.

Je vous rendrai compte en temps utile de toutes les suites de cette affairc.

Le Commissaire de la Police Nationale , Chef des Renseignements Généraux Signé: SOUTIF.

*****************************************************************************************************************

Le rapport figurera dans le dossier débattu devant les tribunaux après la libération. Condamné par contumace, le commissaire Soutif sera par la suite acquitté. (Voir la suite )

Il s’agit là d’un rapport détaillé de police, à prendre comme tel. Il en ressort cependant que le Commissaire Soutif était bien renseigné. Peu d’erreurs se sont glissées dans son texte, par ailleurs très explicite sur son attitude et son activité à l’époque… Il cite “Larnicol Désiré, marin-pêcheur” comme l’accompagnateur de Jean Baudry aux Glénans, alors qu’il s’agissait de Guillaume Bodéré et qu’il avail en personne perquisitionné Ie l9 août chez Jean-Désiré Larnicol

*****************************************************************************************************************

DEUX TEMOIGNAGES.

Au sujet de la mort de François Harré, son épouse, portant plainte à la Libération de Quimper, dira:

«  Mon mari a été arrêté le 8 octobre 1942 par les inspecteurs des R. S. sous accusation d’être communiste. Il a été transféré à la prison de Mesgloaguen et maltraité tous les jours du 9 au 12.

J’ai appris par un gardien de la prison dont je ne me rappelle pas le nom mais qu’il sera facile de retrouver ce qui s’est passé le 13 octobre : mon mari a été torturé et est mort de la suite des mauvais traitements que lui avaient infligés les inspecteurs. Ils ont fait croire qu’il s’était pendu. C’est faux puisque c’est dans la salle dite de torture qu’il se trouvait à ce moment là… »

Madame Fauglas, prisonnière dans la cellule voisine tenait le même langage

Mlle Marie Philippe, employée au Commissariat des Renseignements, déclarera à la Sécurité Militaire:

« En octobre 1942, M. Harré, demeurant allée des Primevères à Kerfeunteun a été arrêté pour activité communiste. Je ne me rappelle pas par quel service il a été arrêté. Après son arrestation, la police a découvert trois caisses de tracts communistes, expédiées de Paris (je crois) et destinées à un certain M. Legrand, demeurant, rue Kéréon à Quimper. La police avait établi que M. Legrand n’existait pas dans cette rue et que, les caisses étaient en réalité destinées à M. Harré. M. Harré a été interrogé plusieurs fois, hors de ma présence, je ne sais par quel commissaire. Je me rappelle avoir vu M. Harré à la prison de Mesgloaguen. Il se trouvait dons une cellule allemande. Je ne peux dire s’il portait des traces de coups. Je me trouvais dans la cour de la prison de Mesgloaguen, quand M. Soutif a commandé à M. Riand de faire venir M. Harré pour le soumettre à un nouvel interrogatoire. M. Riand, est parti le chercher, puis est revenu en courant disant que M. Harré s’était pendu dans sa cellule. J’ai vu dans la cellule le corps de M. Harré. Je n’ai pas regardé le cou de M. Harré et ne peux dire s’il portait bien des traces de strangulation, mais j’ai vu sa ceinture de flanelle portant un noeud marin. M. Tuset médecin du Service Départemental d’hygiène a été appelé pour examiner le corps de M. Harré. M. Tuset pourrait dire quelles sont les causes de la mort de M. Harré. Dans l’affaire Fouglas er Harré ont été impliquée une soixantaine ou plus d’autres personnes. La majeure partie de ces personnes ont été maintenues en état d’arrestation et traduites devant la cour spéciale de Rennes ».

Et voici pour expliquer les « aveux » d’Eugène Le Bris:

« Le nommé Le Bris de Lanriec, se trouvait dans la même affaire. Je l’ai vu à Lorient et à Quimper. Il a certainement été torturé ainsi qu’Hervé d’ailleurs, par la S.P.A.C. (section spéciale anti-communiste). Chaque fois que j’ai vu Le Bris il se trouvait couché, à la suite des nombreux coups qu’il avait reçus. Je me rappelle avoir vu à Quimper un Inspecteur de la S.P.A.C. nommé Schwartz, mais je ne sais si c’esr cet inspecteur qui a frappé Le Bris. Schwartz, était d’une taille moyenne et paraissait maladif. Il portait une longue balafre à une joue. Il disait que c’était un communiste qui I’avait blessé.

Les procès-verbaux, relatant l’interrogatoire des personnes impliquées dans cette affaire se trouvent, je crois, à la Préfecture (service du comité d’épuration).

Fait à Quimper, le 5 janvier 1945. M. Philippe » .

**********************************************************************************************************

SOUTIF : L’ARRESTATION , L’EVASION ET LA SUITE….

Le 2 décembre 1944, Soutif vient à Quimper, appelé par le commandant Le Floch, du 2e bureau, et par le substitut du Procureur de la République, M. Macé, pour se disculper et donner des éclaircissements sur sa conduite pendant l’occupation…

Le commandant Le Floch me présente Soutif à mon bureau vers 11 h et me demande si j’ai vu le dossier le concernant. Après ma réponse négative, je demande au capitaine Soutif de revenir me voir vers l7 h.

Dans le courant de l’après-midi; après un rapide examen du dossier Soutif, je décide I’arrestation immédiate de celui-ci et je demande au Préfet, sur présentation du dossier. d’opérer rapidement cette arrestation. Ce qui est fait vers l7h le même jour (l). Soutif est enfermé à la prison de Saint-Charles à Quimper.

Le dossier Soutif présente des affaires d’une importance capitale pour nos services du point de vue C.E., mais Soutif, interrogé par moi et le lieutenant Branchoux, refuse de parler en dehors du juge d’instruction et assisté de son avocat.

Le mardi l7 janvier 1945, vers 16h, Soutif est ramené de la prison Saint-Charles au cabinet du juge d’instruction pour y être entendu par le juge, sous la garde d’un agent de la paix. En cours de route, Soutif déclare à cet agent:  « Je vais sortir bientôt de prison et je prendrai le pouvoir, puis je mettrai en prison ceux qui m’ont fait arrêter » . Soutif demande ensuite: « Est-ce que les routes sont toujours gardées par les gardes civiques républicains? »

Après l’interrogatoire de Soutif par le juge Sultana, vers l8h se présente au cabinet du juge, le lieutenant Henry de la D.S.M. de Paris, porteur d’un ordre de mission émanant de cet organisme. Sur présentation de cet ordre de mission, le lieutenant Henry demande au juge Sultana de lui laisser la garde de Soutif qu’il va conduire au B.S.M. de Quimper pour interrogatoire et de là, à la prison Saint-Charles. Sur la foi de ces déclarations, le juge remet Soutif au lieutenant Henry qui, au lieu de faire ce que promis, ramène Soutif à Paris et lui donne toute liberté.

( 1 ) Par René Bleuzen, responsable de la sûreté politique au commissariat de Quimper qui l’avait connu en service.

Vers 20 h, le commissariat de police de Quimper me demande si Soutif est toujours au B.S.M. La prison Saint-Charles demande si Soutif ne rentre pas car il est parti depuis longtemps. J’apprends ainsi que Soutif est en fuite…

Capitaine Pierre Dréau, commandant le Bureau de la Sécurité Militaire de Quimper.

Au cours de cette entrevue avec le colonel CHRETIEN , cet officier supérieur nous a avoué avoir envoyé à Quimper le lieutenant HENRI avec une voiture pour prendre SOUTIF qui devait être remis en liberté selon un coup de téléphone qu’il aurait reçu de QUIMPER

FAIT à Paris , le 26 janvier 1945

Le signataire : illisible (en fait Capitaine Dréau)
Entre temps ….

Télégramme du BSN de Rennes au capitaine Pierre Dréau:

” 179.0. Vous demande de fournir de toute urgence motifs exacts arrestation Soutif. Stop. Source des accusations. Stop. Renseignements demandés par direction Paris. C.T.”.

« B.S.M. Quimper à colonel Chrétien 2, Bd Suchet, Paris 16e. Soutif arrêté par nos soins pour activité anti-gaulliste acharnée. Stop. Pour destruction systématique éléments résistance dont nombreux morts. Quantité déportés. Stop. Pour demandes réitérées aux Allemands récompenses pour ces destructions. Stop. Preuves fournies par propres dossiers services Soutif. Signé Dréau”.

Télégramme du colonel Chrétien à Moinet S.M. Rennes n° 23 du 30:

« Demander à Général commandant Région intervenir pour que Dréau dont activité désordonnée Quimper présente graves inconvénients soit affecté autre région et hors service. signé Chrétien »…

« Reçu le 2. 1.45 à 18 h, .signé Moinet ».

——————————————————-

Au Capitaine Dréau Rennes le 4 janvier 1945

Note pour l13 Confidentiel Personnel Officiers

« Un ordre arrivant de Paris prescrit que le capitaine Dréau recevra incessamment une autre affectation. En conséquence, dès réception de la présente note, le lieutenant Branchoux, prendra le commandement du poste et le capitaine Dréau attendra sa nouvelle affectation. »

Le capitaine Moinet Cdt le B.S.M. 11.

—————————————————–

Les « comites de libération et amicales de Maquisards du Finistère » adresseront une lettre de protestation au général Allard, commandant la XIe Région Militaire. Une délégation conduite par le colonel Berthaud, chef des F.F.I. du Finistère, du lieutenant-colonel Chevalier, du commandant André, du capitaine Harel et du capitaine Dréau se rendra plus tard à Paris pour « réclamer l’arrestation Soutif et de ses acolytes pour les crimes contre la résistance » . Dans les locaux de l’avenue Foch, le Capitaine Dréau poussera une porte sur laquelle était écrit: « Capitaine Simonin » . Il la refermera bien vite pour éviter que l’un de ses accompagnateurs ne procédât à une exécution sommaire: il avait vu soutif à son bureau… Simonin était son nom d’emprunt . on perdra par la suite sa trace……

Jusqu’à la découverte le 1er juillet 1947 du « plan bleu » (de la couleur du dossier), lors d’une perquisition au château du comte de Vulpian à Lamballe. Il s’agissait d’un complot farfelu contre la République pour s’emparer du pouvoir après avoir fait croire à l’imminence d’un putsch communiste. Un coup de main était prévu à Fresnes pour délivrer les prisonniers politiques qui eussent été ensuite groupés en formation de combat…

Premières mesures: suppression de la C.G.T., de la C.F.T.C., dissolution du P.C. Interdiction des grèves…

On trouvera au château des ordres de bataille, des dispositifs de combat, des instructions secrètes, des actes constitutionnels rédigés dans un style et dans un esprit très pétainiste, un plan de constitution d’une sorte de directoire militaire, des armes, jusqu’à des mitrailleuses lourdes… Les réunions se tenaient chez Mme Vve Maurice de Waleffe, dans un bureau où s’étalait le portrait de Mussolini en pied, dédicacé à la dame.

Au jour J, c’était de Bretagne que les chefs de la conjuration devaient marcher contre le gouvernement…

« Condamné à 20 ans de travaux forcés par la cour de justice de Rennes après la Libération (2), évadé de Quimper et prenant les noms de capitaine Simonin, puis Cuvillier, Soutif est arrêté. II était plus spécialement chargé du noyautage des administrations et de la reconstitution des réseaux de la nouvelle clandestinité, des maquis noirs, composés en majeure partie d’anciens membres de la L.V.F., de miliciens et de Waffen S.S. ». (Le Télégramme de Brest, 7 juillet 1947). …

Et d’anciens résistants.

(2) Par contumace

*****************************************************************************************************************

Messages…

SOUTIF HENRI Profession: Commissaire à Quimper

l 368 17-544 ler ‘De B.C.R.A.

XC 6/5 30.410. Valeur inf .23.3.44

L’intéressé a été signalé par le M.U.R. comme particulièrement favorable aux organisations de résistance de Bretagne. Or, d’après une information de source sûre, Soutif est le seul commissaire des renseignements généraux de cette région qui ait la confiance totale du commissaire divisionnaire Morellon, dont l’attitude hostile est bien connue.

Grâce à ce dernier, Soutif, qui a fait partie de la franc-maçonnerie, a obtenu 2.000,00 F par mois des fonds secrets destinés à un individu qu’il a fait entrer dans un mouvement de Résistance pour lui servir d’indicateur.

Ce fonctionnaire a signalé un grand nombre des organisations de résistance et en particulier le sénateur Le Gorgeu, ancien maire de Brest et le général de Penfentenyo de Kerverigen.

Le courrier intercepté par le-commissaire de Vannes a permis à celui-ci de faire prévenir ces deux personnalités qui se sont enfuies de leurs demeures (l).

(1 ) Le commissaire des renseignements généraux à Vannes : Andrey. Il s’agissait d’un rapport adressé au Commissaire régional.

*****************************************************************************************************************
DOSSIER SOUTIF

59 documents remis au Procureur de la République à Quimper , et , entre autres :

8 bis : Rapport de Soutif sur l’affaire Le Brun de Guilvinec

9. Une lettre de soutif au Préfet du Finistère , à tous les services vichystes et à la Gestapo de Quimper en date du 2 septembre 1943 relatives aux réfractaires du bois de Quéinnec.

19. Un rapport de Soutif au Préfet sur le départ de Trellu

20. Un rapport de Soutif sur le gaullisme et de dénonciation des dirigeants du gaullisme comprenant 9 pages.

21.Lettre du 6 octobre 1942 de Soutif au « Kommandant de la Feldkommandantur 752 à Quimperpour libération de prisonniers de guerre comme suite à ses hauts faits et des collaborateurs contre la résistance française ».

22. Note du 15 janvier 1943 de Soutif à la Feldkommandantur 752 pour libération de prisonniers de guerre en récompense de services rendus aux Allemands .

23. Lettre de Soutif au Préfet sur l’activité de Luc Robet .

25. Lettre en date du 20 septembre 1942 pour dénonciation de 4 personnalités politiques

28. Rapport du 15 novembre 1943 sur dénonciation d’hébergement de patriotes.

31. Copie en allemand d’une demande de libération de prisonniers de guerre par mesure de récompense ( deux pages) en faveur de Soutif.

39. Rapport de Soutif à Bettger , chef du Ausenkommando de Quimper ( 2 pages)

42. Rapport du chef de la Gestapo de Quimper , Roth , à Soutif sur le dépôt d’armes de Léchiagat.

 

DECLARATION DU COMMANDANT BRANCHOUX

Pendant mon voyage à Paris , je fus amené à interroger dans le bureau , en présence du Colonel Chrétien , le S/Lieutenant Henry et l’officier-adjoint du Capitaine Soutif, évadé de la Prison Saint-Charles à Quimper.

Voici succinctement la teneur de leurs déclarations .

S/Lieutenant Henry « J’avais reçu mission d’aller rechercher à Quimper le Capitaine Soutif qui devait être mis en liberté provisoire .Arrivé là-bas, je me présentais directement à son avocat , Maître Bastard qui me confia une enveloppe à remettre au juge d’instruction chez qui devait se trouver le Capitaine . J’ignore le contenu de cette enveloppe mais je l’ai remise en main propre à Monsieur le Juge d’Instruction. Je nie formellement avoir parlé d’amener le Capitaine au Commandant du B.S.M. de Quimper. J’ai exécuté ma mission scrupuleusement en agent de liaison et sans demander aucune explication.

Soutif ne m’a fait aucune confidence pendant le trajet jusqu’à Paris. Je l’ai conduit au 2 boulevard Suchet le mercredi soir, et il y est revenu le jeudi matin. Je suis prêt à faire cette déclaration par écrit »

Adjoint de Soutif : «  Mme Soutif m’avait téléphoné m’avait téléphoné pour m’annoncer que son mari devait être mis en liberté provisoire .Elle vint me voir le vendredi 12 janvier et je téléphonai aussitôt à Me Bastard pour lui demander le jour de la libération de Soutif. Sur sa réponse : mardi prochain, je fis le nécessaire pour qu’on aille le prendre à Quimper »

Il est surprenant que deux officiers du B.S.M. confiants dans l’affirmation de la femme d’un détenu , se soient adressés à l’avocat de ce détenu sans demander l’avis du Préfet ou du commissaire de police ou même du B.S.M. de Quimper.

Il est surprenant qu’un officier porteur d’ordre de mission et qui dit avoir scrupuleusement observé la consigne reçue ne se soit pas conformé à cet ordre même qui lui enjoignait de s’adresser au B.S.M. de Quimper

Quimper , le 21.01.1945 Signé Branchoux

On observera la contradiction entre l’ordre de mission : «  procéder à l’interrogatoire » et la déclaration de Henry : « aller rechercher à Quimper le capitaine Soutif » .

En 1939 , Soutif avait adhéré à la SPAC, la «  Section Police Anti-Communiste », à Rennes.

Ses actions à l’encontre de la Résistance et d’autres qui provoquèrent des vides dans le milieu communiste, lui vaudront d’être arrêté à la Libération ( en tenue de capitaine) par la police et conduit à l’ école Saint-Charles convertie en prison. Il y aura tout de suite des interventions pour sa remise en liberté, celle des juges du tribunal , par exemple , auprès de Pierre Dréau. le commandant de la Sécurité militaire, qui se montrera intransigeant  « en raison du nombre de morts que ce monsieur a sur la conscience » Sa réponse aux juges dans une pièce derrière la salle d’audience au palais de Justice. Un groupe alors organisera son évasion au cours de l’instruction.

Peu auparavant. un authentique responsable. du nom de Redeau. lieutenant du BCRA était venu de Paris. prendre des dossiers importants, dont celui de l’ancien commissaire , comportant notamment un panégyrique où il détaillait toute son activité dans le but d’obtenir la libération d’un cousin prisonnier outre-Rhin (Témoi­gnage de Maurice Dirou , à l’époque attaché au deuxième bureau installé à Kerfeun­teun ). Deux jours après, Redeau était assassiné à la Maison brûlée de Maisons-Alfort. Soutif s’évanouira dans la nature, plus  précisément à Antony, dans la région pari­sienne , chez un ami résistant. Condamné par coutumace, il passera de nombreux mois dans la clandestinité sous le nom de Georges Cuvillier et trouvera emploi aux ” Compagnons de la Victoire “, puis à la” Confédération générale des Combattants “. Mais la Sécurité militaire poursuivait ses recherches. Impliqué plus tard dans le « Plan bleu » complot farfelu contre la Quatrième République , il sera de nouveau incarcéré. Il aura ainsi à répondre cette fois des faits sous l’Occupation. Il expliquera sa conduite , apportera des attestations de son appartenance au réseau « Alliance ». A Jean Désiré Larnicol il répliquera :

– « Mais je ne vous ai pas arrêté » , escamotant le départ soudain des Allemands vers Dieppe ce matin-là.

Son avocat Maître Tixier-Vignancourt coupera deux fois la parole à Pierre Dréau qui devra. pour continuer son témoignage. le repousser vivement du coude. La cour de justice de Paris acquittera Henri-Jean Soutif , d’origine oranaise.

( Relaté dans « Les Clandestins de l’Iroise »de René Pichavant , dans l’article consacré à la fuite de Jean-Désiré Larnicol.)


POUR UNE CARTE DE RÉSISTANCE

Lesconil, le 26 septembre 1956

Monsieur Dréau Pierre,

Inspecteur de la navigation a

Monsieur le Préfet du Finistère

Cabinet du Préfet , Préfecture

QUIMPER

OBJET: La demande d’attribution de la carte de combattant volontaire de la Résistance présentée par M. Soutif Henri Prudent, ancien commissaire de police à Quimper.

REFERENCE : La lettre DK.MK n’ 14446 du 10 septembre 1956 de Monsieur le Secrétaire Général de l’Office départemental des A.C. et V.G.

Monsieur le Préfet.

Malgré mon désir de vous être agréable, je n’ai pu répondre avant ce jour à la demande de la Commission départementale de la carte du Combattant volontaire qui désire connaître mon avis sur Soutif. J’attends encore à l’heure actuelle certains documents de cette affaire.

Je vous prie, Monsieur le Préfet, de vouloir bien m’excuser de ce contre-temps. Je puis cependant fournir certains renseignements qui peuvent éclairer la commission dans ce cas particulièrement grave d’attribution de la carte du combattant volontaire de la résistance à un homme qui a exercé avec tant de zèle ses funestes exploits contre les réfractaires et les résistants du Finistère.

La lettre de référence stipule que M. Soutif est titulaire d’une attestation d’appartenance au réseau ” Alliance », en qualité d’agent P.I., du l” mai 1941 au 30 septembre 1944.

Mais. le 28 août 1944. à Paris. à l’hôtel Majestic, devant un officier interrogateur de la France Combattante, service A.S.A., Soutif a fait les déclarations suivantes :

« …J’ai adhéré en novembre 1943 à un mouvement de résistance appelé “L|’Armée française” et j’ ai exercé la fonction de chef de bureau de renseignements. …J’ai pris contact avec l’organisation en faisant la connaissance de son chef Luc Robet domicilié à Douarnenez, Finistère, sur le compte de qui j’avais été chargé d’effectuer une enquête….Je transmettais les renseignements d’ordre politique. Les renseignements militaires étaient réservés à un militant que je n’ai jamais connu que sous le nom de Despagne et qui ne me connaissait moi-même que sous le prénom d’Emile, à deux officiers du Général Juin à Alger dont l’un habitait Rennes et l’autre Quimperlé. J’ai nanti ces officiers ainsi que de nombreux membres de l’organisation de fausses cartes d’identité etc…

…Dès 1940, ou cours de conférences bi- hebdomadaires que j’avais à la Gestapo, je me suis toujours efforcé d’égarer les recherches des Allemands .

….J’ai efficacement saboté le S.T.O.

….J’ai facilité le départ en Angleterre du commandant Talec de Douarnenez, officier de la Légion étrangère qui selon sa femme etc…

C’est à cet officier que je communiquais les noms des personnes devant être arrêtées par la Gestopo pour la région de Douarnenez.

….J’ai volontairement saboté une affaire criminelle importante, refusant d’enregistrer les aveux d’un militant patriote du mouvement Libération, lui évitant de comparaître devant la cour martiale de Rennes. Cette activité m’a valu d’être recherché par la Gestapo (où j’avais placé des informateurs à ma solde) etc…

…Mes contacts officieux avec des militants de la Résistance ont été innombrables. Luc Robet à Douarnenez, alias Fanch, m’a le premier recruté.

…Activité dans la région de Rennes.

…Caché à Longjumeau (Seine & Oise) sous le nom de Simonin, je me suis joint aux patrouilles américaines de la M.P. pour la recherche des prisonniers allemands dès le premier jour de la libération de cette localité. »

Il est ainsi établi Monsieur le Préfet, par une déclaration déposée devant un officier des services compétents par monsieur Soutif lui-même qu’il a été recruté par Luc Robet qu’il était chargé de surveiller en novembre 1943.

(suit l’énumération des griefs rassemblés dans le dossier de 1945)

…..Tel est , Monsieur le Préfet , Soutif , l’homme qui demande la carte de combattant volontaire de la Résistance.

Soutif certifie sincère et véritable avoir été recruté par Luc Robet en novembre 1943 pour la première fois

.Cela est acquis par déposition officielle .

Le réseau « Alliance » atteste que Soutif faisait partie de ce réseau depuis le 1er mai 1941. Tout réseau doit obtenir des comptes de ses agents . Ainsi le réseau « Alliance » devait se tenir informé à tout moment de l’activité de son agent.

Si le réseau « Alliance » a été informé des hautes œuvres de Soutif dans le département , pourquoi le réseau ne l’a-t-il pas supprimé ou interdit ? Il y a lieu de connaître tout de suite le travail accompli par ce réseau dans notre département et avec quels agents . Tous les agents étaient particulièrement surveillés dans leurs œuvres et par leurs rapports transmis au réseau par leurs agents de liaison. Il faut savoir qui étaient les agents de liaison, ce qu’ils sont devenus, combien de fois ils ont vu Soutif et quelle était la nature des renseignements fournis par lui.

Si , comme je le pense , (et comme Soutif l’affirme le 28 août 1944) Soutif n’a jamais fait partie d’aucun réseau, l’attestation du réseau « Alliance » est un faux et le Chef qui l’a délivré doit être poursuivi.

Tel sont , brièvement exposés , les renseignements que je vous communique ce jour sur Soutif. J’estime qu’il ne peut être question de carte de combattant en sa faveur.

Je vous ai livré ici des documents , inédits pour la plupart , sans commentaire ( ou si peu) , non pour remuer à plaisir la boue d’un proche passé, mais pour l’Histoire ; mais pour reproduire , dans sa brutalité parfois, dans les détails aussi, l’esprit qui anima les uns et les autres en ces temps de l’Occupation et les faits qui en résultèrent.

… Mais parce que ces choses-là doivent être dites enfin, telles quelles , sans arguties, preuves à l’appui.

Et qu’elles permettent à tout un chacun de juger sur pièces , en son âme et conscience.

*****************************************************************************************************************


Un documentaire Sur la Police de Vichy

Ce documentaire retrace les années noires de la police française, de la collaboration à la traque des communistes en passant par les rafles de juifs, la Résistance, la Libération et l’épuration. Grâce à des archives rares et au moyen de l’animation et de la création graphique, ce film redonne vie aux principaux responsables politiques et administratifs de la police de Vichy comme Pierre Laval, René Bousquet et Pierre Pucheu. Leurs paroles ont été consignées dans des mémoires, dans des procès-verbaux d’audition ou à travers des correspondances et livrent de l’intérieur, une histoire inédite de la police de Vichy.

(malheureusement ce’ documentaire n’est plus en ligne sur Youtube…)


Un documentaire de Patrick Rotman « Les collabos »


Un livre de l’historienne Annie Lacroix-Riz sur un certain patronat français pendant l’occupation

Une photo significative de 1942

******************************************

Soutif s’en est bien tiré grâce à des complicités et au soutien actif du « réseau Alliance »

Marie-Madeleine FOURCADE avec son « complice » Luc ROBET, a protégé le commissaire Henri-Jean SOUTIF lors de son procès.
Le dossier sans doute incomplet sur Fourcade, Luc ROBET (futur maire de Poullan-sur Mer) après guerre, H. Soutif….et le réseau Alliance.
Amicalement,
courrier de Yves MAZO – ANACR 29 à Gaston Balliot

Un article sur Henri Soutif dans le bulletin n°20 de l’Instutut d’Hiqstoire Sociale Bretagne de mars 2022 :Télécharger cette page en PDF