Mars 1943, des aviateurs recueillis

Le 6 mars 1943 un bombardier américain est touché par un avion allemand lors d’un raid sur Lorient. Voyant qu’il ne pourra pas regagner sa base en Angleterre le chef de bord Ryan se déroute vers le pays bigouden afin de parachuter l’équipage. Une partie de l’équipage est capturée par les allemands, deux aviateurs, Blackmore et Ryan, sont recueillis par la population.

Le sergent Blakemore, qui a sauté le premier, a atterri à Lestiala (entre Plomeur et Beuzec) et échappé aux poursuites. Le Lieutenant Simmons, copilote, qui a été l’avant-dernier à quitter l’appareil, s’est posé au voisinage de Kergroes (sur la route de Tronoen après Kergroes). On connaît, hélas, son triste sort : Déjà blessé au visage par les éclats du pare-brise arraché par l’hélice du moteur numéro trois quand elle s’est détachée, il est finalement assassiné au sol par un allemand. Les autres membres de l’équipage, hormis le pilote, ce sont donc disséminés entre Lestiala et Kergroes, dans une zone où la densité allemande était forte et les caches très rares. Aussi ont-ils été très rapidement rejoints par les allemands lancés à leurs trousses.
Toutefois, le radio Perry, n’a été appréhendé qu’une heure après s’être posé, mais il n’a pas eu la chance de trouver l’aide immédiate qui aurait pu le sauver.

Le capitaine Ryan, a quitté l’appareil alors qu’il volait encore à 350 km/h environ et à une altitude relativement basse ce qui lui a valu un atterrissage très brutal à Lanluriec, derrière l’atelier de menuiserie de Monsieur le Floch. Le choc sur son épaule déjà blessée à l’ouverture de son parachute, lui a fait perdre connaissance mais il a aussitôt profité de l’aide intelligente et efficace de la population locale : Madame le Floch qui se trouvait au voisinage de son point de chute a aussitôt prévenu les ouvriers de l’atelier et les voisins qui l’ont aidé à se défaire de son harnais, ont enterré son parachute et bien orienté sa fuite. Cela l’a sauvé.

Blakemore et Ryan ont été aidés par des résistants, ont ensuite été cachés chez Noël Arhan (hôtel) à Loctudy. (voir ci-dessous le récit/rapport du captain Ryan).
Plus tard le sergent Glenn A Blakemore a été capturé à Paris et envoyé au stalag LUFT 4 où se trouvait déjà le radio du Sweet Pee, le sergent E. Charles Perry. Ils y sont restés jusqu’à la libération du camp par l’armée soviétique.


Un article du bulletin municipal de Plomeur

En juin 1994, la commune de Plomeur a tenu à commémorer les événements de juin 1944 qui ont abouti à la mort de 2 otages : Louis MÉHU et lsidore LE GARO. D’autres événements, moins tragiques, se sont déroulés à PLOMEUR en mars 1943. Il nous a paru intéressant de les relater ici. Le témoignage de Raymond CRÉDOU, directement impliqué dans ces faits, nous a permis de les reconstituer.

Un avion américain touché

Le 6 mars 1943, en fin d’après-midi, un bombardier américain revenant d’un raid sur LORIENT est touché par un avion Allemand. Le bombardier tombe en mer, en baie d’Audierne, mais auparavant, ses occupants ont réussi à sauter en parachute. lls connaissent des fortunes diverses : certains se rendent aux allemands, l’un d’entre eux, le lieutenant SIMMONS est abattu, le commandant de bord est récupéré par des résistants à TRÉMÉOC, enfin le mécanicien Gienn BLACKMOORE tombe près de la ferme de Lestiala. Les propriétaires d’une des fermes Jean CREDOU, sa femme, sa fille, se précipitent vers l’aviateur dont ils ont vu le parachute tomber dans un champ proche. Bien sûr on ne se comprend pas, on ne parle pas la même langue. Au bout de quelques minutes, un de leurs parents Bastien LE BIHAN crie, les allemands arrivent. Ceux-ci évidemment, du bourg, de Beuzec, de Tréminou où ils étaient stationnés avaient vu le parachute. Heureusement, le commis de la deuxième ferme de Lestiala, Pierre-Marie JOLIVET a la présence d’esprit d’enfouir le parachute dans un terrier de lapin. Tout le monde regagne sa maison rapidement.

La fouille des deux fermes

ll y avait à Lestiala 2 fermes: l’une tenue par Monsieur LE PEMP. Lorsque les allemands arrivent, une vingtaine de minutes après le « parachutage », ils fouillent les deux fermes. lls sont une trentaine, ils passent au peigne fin toutes les pièces des maisons, les tas de paille, de roseaux à la baïonnette, les champs sont ratissés : rien. Ils interrogent les propriétaires : ceux-ci assurent qu’ils n’ont rien vu. Les Allemands sont passés à quelques mètres de l’Américain couché dans son champ de colza, sans deviner sa présence. lls repartent bredouille, sous les yeux de Raymond CRÉDOU qui rentré de l’école a trouvé la cour de la ferme remplie de soldats interrogeant son père.

Que faire de I’aviateur ?

L’aviateur reste couché dans son champ de colza. Au couvre feu, vers 21 heures, Jean CRÉDOU et, Bastien LE BIHAN lui apportent un casse-croûte. On le laisse passer la nuit, puis la journée du lendemain. Qu’en faire ? On ne sait pas. Le deuxième soir, Raymond va le chercher, dans son champ, le ramène à la maison pour dîner. On essaie de discuter. L’aviateur sort une carte en soie, demande où se trouve PARIS. Comment y aller ? On le reconduit dans son champ. Le 3e soir, on retourne le chercher. On s’enhardit, les Allemands ne sont pas revenus, il a pris froid, il couchera dans la paille, mais dans la journée il retournera dans son champ. Un avis a paru dans les journaux, a été placardé sur les murs, comme quoi : « Tous ceux qui aideraient… les équipages d’avions ennemis abattus…seraient fusillés sur-le-champ ». Il faut trouver une solution d’urgence.

La solution

Jean CRÉDOU se rend alors à PONT-L’ABBÉ voir son ami Sébastien VOLANT et ses fils qui ont des contacts avec la Résistance. Celui-ci s’entretient avec l’adjudant-chef JAFFRAY…. C’est ainsi que Noël ARHAN de LOCTUDY et Pierre DRÉAU parviennent à la ferme de Lestiala accompagnés de Sébastien VOLANT. Ils apportent avec eux des vêtements civils pour l’aviateur. Celui-ci va gagner LOCTUDY à vélo avec Noël et Pierre. Il partagera à l’hôtel, la chambre de son commandant de bord. Au bout de quelques jours, il quittera LOCTUDY pour QUIMPER d’où il ne partira que huit mois après son « atterrissage forcé »…

(in Bulletin municipal de Plomeur . Avril 1995 )

Note personnelle de Jean Kervision : Ce jour-là , avec quelques camarades,  je me trouvais près du cimetière du Guilvinec quand nous avons vu tomber cet avion, ainsi que les aviateurs sauter en parachute. Quelques jours plus tard , la rumeur publique nous apprenait que l’un d’entre eux avait été tué par un soldat allemand dès son arrivée au sol et qu’il avait été inhumé au cimetière de Saint-Jean Trolimon. Ce n’est que beaucoup plus tard, lorsque nous avons eu les deux fils de Raymond Crédou et de son épouse Denise , Jean-Michel et Ronan, comme élèves à l’École publique de Plomeur que nous avons appris ce fait de résistance de Raymond lui-même.

L’histoire du bombardier américain Sweat Pea racontée par Marcel Buhannic

Un témoignage : Rapport d’évasion du Capitaine John L Ryan

Rapport concernant Gerald L Simmons

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l’hôtel Arhan à Loctudy

Il fallait évidemment prendre beaucoup de précautions pour aider les aviateurs tombés. Voir par exemple cet avis :

Avis publié par les autorités militaires allemandes dans la presse française.